LE BLOG DES COMMUNISTES DE ROMAINVILLE

vendredi 13 novembre 2009

Un front de gauche rassemblé face aux dérives du présidentialisme, par Georges SEGUY

Pourquoi le premier tour des régionales peut-il cristalliser l’espérance républicaine ?
De longue date, persuadé qu’il est vain d’espérer le changement auquel aspire la majorité de notre peuple, sans l’émergence d’une initiative novatrice inédite, capable de promouvoir un large rassemblement populaire et un nouveau rapport de forces, je rallie l’idée de la constitution de listes du Front de gauche, dès le premier tour des élections régionales. Dans la situation actuelle, lourde de nouveaux dangers de régression sociale et démocratique en tout genre, mais forte de la résistance, de la colère et de la profonde volonté de changement du monde du travail, cette offre du Parti communiste revêt une signification nouvelle qui dépasse les classiques accords électoraux au lendemain desquels les dissidences partisanes et les clivages politiques refont stérilement surface. Une offre de nature à prolonger le vaste mouvement social du printemps dernier et à stimuler une dynamique politique sans précédent sous la Ve République, ouvrant la perspective, enfin crédible, d’une alternative économique, sociale et culturelle, mobilisatrice des nouvelles générations, plus sensibles à l’innovation qu’à la tradition.
L’étape du premier tour des régionales prend donc la double importance d’une victoire de la gauche et de l’éclosion d’une nouvelle espérance républicaine, d’où l’intérêt de l’élaboration de programmes régionaux proches des préoccupations citoyennes, mais aussi de projets de transformation profonds en rupture avec la voracité du capitalisme. À cet égard, bien que le syndicalisme ne soit pas impliqué dans les élections politiques, son indépendance ne saurait le laisser indifférent quant à la signification de leurs résultats, et je pense que les cinq propositions économiques, sociales et fiscales contenues dans la déclaration commune des huit organisations syndicales du 5 janvier 2009, approuvées par tous les partis politiques de gauche, restent d’une brûlante actualité. Je suis sûr que les huit signataires de ce texte apprécieraient que l’approbation unanime de ces partis se prolonge en soutien concret dans leur programme et leurs actions. D’ailleurs, la votation citoyenne pour la poste publique à laquelle ont participé plus de soixante organisations est instructive des dynamiques possibles à créer.
Les débats engagés à l’approche du scrutin des 14 et 21 mars 2010 devraient permettre d’éclairer certaines des différences, voire des divergences subsistant entre les tendances de la gauche et nuisant à leur cohésion, à propos notamment de l’édification de l’Europe sociale, des réformes structurelles et fiscales dont dépendent l’emploi, le pouvoir d’achat, la Sécurité sociale, les retraites et les services publics. Ces débats devraient également s’étendre aux traits les plus antidémocratiques de la Ve République, sous la domination de N. Sarkozy, et spécialement la question de savoir si le moment n’est pas de remettre en cause l’élection du président de la République au suffrage universel. Quand, en 1962, Charles de Gaulle proposa aux Français d’adopter ce système par référendum, la majorité pensait que ce mode d’élection garantirait l’équilibre du pouvoir, dans des circonstances fortement perturbées par l’écroulement de l’empire colonial français et la faillite de la IVe République. De plus, le prestige personnel du Général écartait toute crainte d’atteinte à la démocratie, que dénonçaient les adversaires de cette institution du pouvoir présidentiel.
Un siècle après, la situation dans laquelle se débat la Ve République démontre, de toute évidence, que les adversaires de ce présidentialisme étaient loin d’avoir tort. On pourrait, certes, épiloguer sur l’envergure d’homme d’État du président des années 1960, comparée à celle de Nicolas Sarkozy, mais l’essentiel n’est pas là. L’essentiel réside dans les évolutions économiques, sociales et politiques, nationales et internationales de ces cinquante dernières années durant lesquelles les fameuses trente glorieuses ont lamentablement dérivé vers une crise mondiale du capitalisme sous la protection, en France, d’un pouvoir outrancièrement personnalisé qui, par réformes constitutionnelles, ordonnances, décrets ou charcutage électoral, est en train de se transformer en monarchie sous la haute autorité d’un autocrate. Quand on sait que, pour la partie la moins politisée de l’électorat, certes infime mais réelle, le look et le bagout des candidats à l’Élysée séduisent plus que leurs idées ou leurs programmes, on comprend qu’un petit pourcentage de ces électeurs puisse au second tour plébisciter, dans l’exercice des pleins pouvoirs, l’un des deux outsiders. Drôle de démocratie  ! Sans aller jusqu’à boycotter ce scrutin tant qu’il existe, il faut bien admettre, aujourd’hui, que l’élection du président de la République au suffrage universel est incompatible avec la participation citoyenne à la vie publique et caricature la République. Voilà pourquoi il me paraît incohérent et illusoire de vitupérer les abus de pouvoir de N. Sarkozy tout en laissant entendre que désormais l’élection présidentielle est le seul moyen de lui succéder. Cette singulière stratégie strictement consacrée au meilleur candidat vedette anti-Sarkozy concourt à valoriser la nocivité du présidentialisme et tourne le dos au rassemblement unitaire, seule force capable de sortir le pays du marasme.
Alors, avec ou sans appartenance politique, syndicale, associative, écologique, militants de toutes sensibilités du Front de gauche, unissez vous !

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